SOMMAIRE DROIT ADMINISTRATIF | SUJETS D'EXAMEN |
La facilité ou la difficulté avec laquelle l’administration va exercer ses compétences pourra s’analyser d’une part en prenant compte des moyens de contrôle et deuxièmement en évaluant la bonne ou mauvaise exécution des décisions rendues par les juridictions administratives.
Si des progrès incontestables ont été accomplis en matière d’accès au juge et en matière de technique de contrôle des juridictions administratives (1ère partie), on ne saurait néanmoins occulter l’insuffisance des moyens mis à la disposition de la justice administrative et occulter également le non respect de l’autorité de la chose jugée (2ème partie).
I - Le développement de l’accès et de la technique de contrôle du juge administratif
1 - Des conditions de recours plus libérales notamment en ce qui concerne «l’intérêt à agir »
- individuellement :
les décisions financières prises par les collectivités locales peuvent être contestées par les contribuables locaux (CE 29 mars 1901, Casanova), par contre les décisions financières nationales ne peuvent pas être contestées par les contribuables nationaux (Dufour);
- collectivement :
CE 28 déc. 1906, Syndicat des patrons coiffeurs de Limoges au nom de l’intérêt général des associations
CE 21 déc. 1906, Syndicat des propriétaires et contribuables du quartier Croix-de-Seguey-Tivoli pour l’intérêt du quartier
2 - Extension du champ du contrôle du juge
Le REP est toujours possible, il est considéré comme un PGD même sans texte et même si un texte l’exclut (CE Ass. 17 fév 1950, Ministre de l’agriculture c. Dame Lamotte)
Le recours gracieux et le recours hiérarchique sont aussi toujours possibles (Queralt 1950)
De même que le recours juridictionnel (CE Ass 7 fév 1947, d’Aillières)
Toutes ces extensions ont été possible sur le fondement que le REP est un PGD.
Quels sont les actes susceptibles de recours?
=> quels sont les actes insusceptibles de recours?
Il y a deux catégories plus ou moins résiduelles dont le CE diminue le caractère inattaquable :
* Les actes de gouvernement
CE 19 fév 1875, Prince Napoléon, arrêt qui met fin à la théorie dite du «mobile politique ». Cependant, cet arrêt n’a supprimé complètement les actes de gouvernement dont la jurisprudence dresse la liste selon deux catégories :
- Les relations entre les pouvoirs publics
:
ex : décret de dissolution de l’Assemblée Nationale (CE 20 fév 1989, Allain).
ex : mise en oeuvre de l’article 16 (CE Ass 2 mars 1962, Rubin de Servens).
- la conduite des relations internationales :
ex : (CE 1995, Greenpeace).
En ce qui concerne les mesures d’extraditions : CE Ass 28 mai 1937, Decerf, complété par CE Ass 30 mai 1952, Dame Kirkwood en matière d’extradition. Dans l’arrêt de décembre 1993 Saniman , le CE reçoit même une demande de recours contre la décision d’annulation d’un décret d’extradition faite par le pays l’ayant demandé.
En ce qui concerne les mesures disciplinaires concernant les lieux clos, la jurisprudence a considérablement évoluée.
Le règlement intérieur des écoles est susceptible de REP. Deux arrêts rendus concernant le port du foulard islamique : Kherouaa (CE 2 nov. 1992) et Yilmaz (1993).
Les casernes : avant les mesures disciplinaires ne faisaient pas grief et depuis l’arrêt Hardouin (17 fév 1995) la sanction est désormais susceptible de REP.
De même pour les prisons depuis l’arrêt Pascal Marie du même jour (17 fév 1995).
On peut donc voir qu’une grande partie des mesures d’ordre intérieur disparaissent et rentre dans le cadre des actes susceptibles de recours.
L’accès au juge est largement facilité :
1) par l’absence de ministère d’avocat en matière de REP (sauf cassation)
2) les dispositions de la loi du 2 mars 1982 sur le déféré préfectoral avec la possibilité de mettre en oeuvre le déféré préfectoral provoqué mais le préfet n’est pas obligé de déférer (CE Commune de Belcoden et depuis l’arrêt Brasseur de 1991 le refus du préfet n’est plus susceptible de REP).
1 - Une instruction inquisitoire
La méthode d’instruction des affaires devant la justice administrative relève de la méthode inquisitoriale cad que tant le rapporteur qui prépare, que le juge disposent de pouvoirs étendus d’investigation en fait et en droit.
En fait : déplacement, communication des pièces, demande d’expertise.
En droit : CE 1954, Barel : l’administration doit communiquer au juge les motifs précis pour lesquels elle a refusé, en l’espèce, l’inscription d’un candidat au concours d’entrée de l’ENA.
2 - L’approfondissement du contrôle du juge administratif
* Approfondissement des normes de références c'est-à-dire augmentation du bloc de légalité :
- création et extension des PGD avec l’arrêt CE Sect. 5 mai 1944 Dame Veuve Trompier-Gravier et la reconnaissance du premier PGD : les droits de la défense; puis l’arrêt CE Sect. 26 oct. 1945 Aramu, portant aussi sur les droits de la défense.
- intégration au bloc de légalité du droit international, qu’il soit postérieur ou antérieur à une loi, cela ne fait plus de différences depuis
l’arrêt Nicolo (1989).
* Extension du contrôle du juge, notamment quant au pouvoir discrétionnaire :
- contrôle réduit qualifié notamment par l’EMA (erreur grossière que même un esprit profane ne pourrait pas faire) CE Ass 2 nov. 1973 Société anonyme « Librairie François Maspero »
- contrôle étendu fondé notamment sur le contrôle de proportionnalité en matière de police CE 19 mai 1933 Benjamin en matière d’urbanisme CE Ass 28 mai 1971 Ville Nouvelle « Est » en matière de police spéciale CE Belcasem et Babas (?) 1991.
II - L’insuffisance des moyens de matériels et juridiques menace néanmoins l’efficacité de l’ordre juridique
En dépit de réformes (dont celle importante de 1987 avec la création des CAA), la justice administrative continue à mettre beaucoup trop de temps pour statuer ce qui conduit à, aujourd’hui, des condamnations récurantes de la France devant la Cour EDH pour violation de l’article 6 § 1 de la Convention EDH qui stipule que toute personne a droit à un procès équitable dans un délai raisonnable.
Au moins six condamnations depuis 1989 et surtout dans le domaine administratif.
ex : CJCE 1989, H c. France au sujet du sang contaminé.
La loi du 8 février 1995 qui a voulu permettre une gestion de ce stock plus facile (extension du juge unique) semble largement insuffisante compte tenue des moyens humains et matériels trop insuffisants.
1 - Le sursis à exécution
Cette procédure constitue un moyen efficace contre les conséquences irrémédiables des actes de l’administration. Il faut un moyen sérieux et des conséquences difficilement réparables.
Le juge n’est tenu de l’accorder malgré la présence de ces deux conditions.
Mais le délai pour statuer est très long donc la loi de 1995 a institué une procédure de suspension du caractère exécutoire de certains actes. Une fois de plus, le prononcé de cette procédure, qui se fait dans l’attente de l’examen au fond du sursis à exécution doit revêtir les deux conditions précédentes. Il est prononcé par le président du TA mais la suspension ne peut pas dépasser trois mois, le juge devra donc statuer au fond rapidement.
La décision du Conseil Constitutionnel du 23 janvier 1987 (sur le Conseil de la Concurrence) a certainement influencé sur sa création. En effet, dans cette décision, le juge constitutionnel a souligné que l’existence d’une procédure de sursis à exécution devant la CA de Paris constituait une garantie essentielle des droits de la défense donc plus de droits pour les administrés.
Depuis la loi du 2 mars 1982, le préfet peut accompagner l’acte qu’il défère d’une demande de sursis à exécution. De plus seul le moyen sérieux est nécessaire.
Si un acte d’une collectivité locale porte atteinte à une liberté publique et que le préfet fait une demande de sursis, le pdt du TA doit statuer dans les 48 heures.
1° apport : si moyen sérieux, le juge doit se prononcer
2° apport : pas besoin de l’existence d’une préjudice difficilement réparable
3° apport : urgence
La loi du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature. Article introductif rédigé par Giscard.
Si on réalise certains travaux en l’absence d’étude d’impact préalable et s’il y a une requête en annulation de la décision de commencer l’exécution avec demande de sursis à exécution, le juge doit accorder le sursis.
Régime encore plus protecteur car aucune condition n’est nécessaire (sauf absence d’étude) et compétence liée du juge.
En matière de police des étrangers, la loi du 10 janvier 1990 modifiant l’ordonnance du 2 novembre 1945 sur les étrangers. Le recours au TA contre une décision de reconduite à la frontière constitue en lui-même une mesure de suspension de cette décision. En appel, le juge administratif peut accorder le sursis à exécution de la décision de reconduite à la frontière 29 juin 1990 Enjin
2 - L’incertitude de la chose jugée
L’exécution des décisions de justice administrative est manifestement trop tributaire du bon vouloir de l’administration.
En effet, à l’égard des administrés, le juge dispose de moyens efficaces pour assurer l’inexécution par des personnes privées : l’injonction et l’astreinte.
A l’égard des personnes publiques, c’est différent, le CE peut prononcer des astreintes complétées par la loi du 8 février 1995 relative au pouvoir d’injonction du juge vis-à-vis de l’administration. Il est encore trop tôt pour se prononcer mais, est-ce que cela va marcher ?
Dissertation d'Antoine Mingasson, étudiant en droit à Paris II Panthéon-Assas. Vous pouvez comme lui nous transmettre par mail des documents rédigés par vos soins et nous les mettrons en ligne s'ils correspondent à nos critères :) |
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